La 250e fugue de Lola Mardi, 19 h 03. Ce soir j’ai décidé que c’était
celui-là. Pourquoi et pourquoi pas ? Ras le bol de vivre les rêves des
autres ; aux poubelles l’image de la mère exemplaire, peu conforme, mais
à sa façon dans le moule des gens sans moule ; comprenne qui pourra. Aux oubliettes la célibataire
épanouie puisque maquillée et soldée à jours fixes, qui ne veut plus d’homme
parce que c’est trop dur de faire comme si, alors que j’ai envie qu’on m’aime
pour moi. Respirer et repartir. Ciao la bonne copine sur laquelle on
peut toujours compter parce que super disponible, une bonne écoute ;
d’ailleurs je fais tellement bien celle qui écoute que j’ai envie de
continuer dans un rôle qui, somme toute, est valorisant. Bye, bye, la professionnelle qui
assure toujours, en tout temps et en toute heure, sur laquelle on peut
compter sans compter, et qui ne culpabilise jamais d’avoir l’air de
travailler alors que je ne fais rien. Adieu, beau gosse qui aimerait bien
avoir une histoire, mais qui a peur de me faire souffrir, et patati et
patata. Stop. Ce soir je fugue. Je fais le mur. Je m’exile. Je lâche. Je tombe les masques. Je m’appelle Lola Montagne. J’ai 47
ans. Je suis Vierge ascendant Cancer et Uranus, dans mon signe depuis trop
longtemps. |
L’orgasme
de Valentine (Christelle
Reix, Théâtre)
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